Midi Madagascar 14/04/03

Invité du lundi : Manandafy Rakotonirina


«  Le jeu politique devrait se jouer au parlement mais non plus dans la rue »,

Le président national du MFM et non moins conseiller spécial du président de la République, Manandafy Rakotonirina, nous apporte son point de vue sur le cas de Pety Rakotoniana et la place de son parti sur l’échiquier politique national. Ce qu’il pense des nouvelles descentes du Kmmr dans les Faritany et des grèves estudiantines. Interview.

Midi-Madagasikara : Nommé officiellement conseiller spécial à la Présidence, quelle est votre réaction et quelle sera votre contribution ?

Manandafy Rakotonirina : Si vous voulez j’ai un passeport diplomatique, en tant que conseiller spécial du président de la République délivré par Sylla le 10 avril 2002. Dès Février 2002, j’ai exercé la fonction de conseiller dans l’entourage du président Marc Ravalomanana. Donc, ma nomination par décret à la date du mercredi 9 avril 2003 n’est qu’une confirmation officielle de cette fonction que j’ai toujours exercée.

Midi : On dit que le MFM est un parti faiseur de roi. Toutefois, votre parti n’a jamais été compris. Ce style s’apparente-il au tempérament des Mafana ?

M.R: Le MFM a la réputation d’avoir une capacité d’anticipation . Si on parle d’un esprit Mafana, c’est peut-être çà. En 89, nous avons énoncé un programme libéral, avant la chute du mur de Berlin en 90. Nous étions parmi les premiers à préconiser une orientation libérale de la politique à Madagascar, après la sortie du Boky mena du régime socialiste. Nous avons dénoncé les dérives possibles du système des provinces autonomes depuis le retour de Ratsiraka. Pendant la crise de 2002, les menaces de sécession dénoncées par le MFM entre 98 et 2001 ont failli se traduire dans la réalité, si Ratsiraka n’était pas politiquement battu, en juin 2002. Le 28/29 mars 2003, nous avons participé en tant qu’observateur à la réunion du comité exécutif de l’Internationale Libérale de Casablanca au Maroc. Si tout se passe bien , nous serons membre à part entière de l’Internationale Libérale, au congrès d’octobre de Dakar.

Midi : Avec le cas de Pety Rakotoniaina qui ne cesse de fustiger le pouvoir, votre poste actuel n’est-il pas délicat ? Est-ce qu’il y aura une nouvelle orientation du parti ? Et quelle sera votre position vis-à-vis du Kmmr ?

M.R : Le cas de Pety oppose, le MFM appuyé par la population de Fianarantsoa, au TIM de cette localité depuis la nomination du nouveau Président de la Délégation Spéciale. Le discours de Pety dénonce l’injustice dont sont victimes les fondateurs du Kmmr. Donc, c’est un conflit entre le Kmmr et le TIM d’une manière générale et particulièrement entre le MFM et le TIM à Fianarantsoa. Que le gouvernement soit critiqué, c’est dans la règle des choses, vue sa pratique jugée injuste et inéquitable concernant le partage des postes de responsabilité au sein du régime en place. Cela ne doit surprendre personne . Nous souhaitons que le président de la République ne s’occupe pas des querelles entre ses partisans. A l’occasion d’une rencontre entre le chef de l’Etat et le Kmmr à Ambohitsrorohitra, le président a accepté le rôle d’arbitre qui lui revient. Je continue d’avoir des relations avec les membres du Kmmr. Je suis en train de travailler sur un projet qui consiste à les intégrer davantage dans les rouages de la République, pour une meilleure efficacité du pouvoir du président Marc Ravalomanana. Et ce, dans l’exécution des objectifs de développement rapide et durable.

Midi : Et à propos des descentes dans les provinces par des membres du Kmmr, ne vont-ils pas faire le jeu de l’opposition ?

M.R : Nous sommes dans un pays démocratique, il ne faut pas laisser au CRN le monopole de réunir les foules. Ce sont des parlementaires qui exercent normalement leurs prérogatives. Si des députés critiquent le Premier ministre ou le gouvernement, c’est dans l’ordre normal des choses. S’ils font le jeu de l’opposition, ils ont organisé un meeting avec le CRN qui s’est déclaré opposant. Lorsque des parlementaires descendent dans la rue, c’est que le jeu politique ne peut plus se jouer au sein de l’Assemblée nationale ou du Sénat. Il faut donc trouver un autre terrain, mais pas dans la rue.

Midi : En tant qu’enseignant-chercheur que pensez-vous de ces foyers de tension qui animent les campus universitaires ? Et ne craignez-vous pas qu’il y a des dessous politiques ?

M.R : Il y a des problèmes à l’université dont le surnombre au sein des cités, les insuffisances d’infrastructures. Cela exige une politique de sélection que la jeunesse d’aujourd’hui ne pourrait pas à accepter. Ils attendent autre chose de la promesse du développement durable et rapide. Le gouvernement doit revoir sa copie. Les dessous politiques s’articulent à ces problèmes réels. Si le gouvernement n’arrive pas à résoudre ces problèmes, les dessous politiques prennent le dessus.

Midi : Parlons économie, le DSRP, votre opinion là-dessus ?

M.R : J’ai participé au DSRP. Il y a deux conditions pour réussir le DSRP. Il y a le critère interne de gouvernance dont l’application ne dépend que des malgaches. Il y a des critères internationaux de gouvernance définis par les bailleurs de fonds qui négocient avec l’Etat malgache. Les conditions semblent favorables si nous réalisons les critères de bonne gouvernance. C’est pour cela qu’il faut critiquer le gouvernement lorsqu’il y a des failles dans sa pratique, et ce rôle revient aussi bien aux tenants du pouvoir qu’à l’opposition, surtout à l’Assemblée nationale. Donc attendons et voir que l’Assemblée se réunisse début mai

Dominique R

L’express de Madagascar 14/04/03

Manandafy, conseiller spécial
La nomination de Norbert Lala Ratsirahonana, ancien chef de l'Etat et de gouvernement, président national du parti Avi, comme ambassadeur itinérant n'a pas étonné outre mesure. Celui de Manandafy Rakotonirina comme conseiller spécial agite le microcosme au moment où, depuis Toliara, l'on apprend que le Kmmr nouveau au sein duquel évoluent de fortes personnalités Mfm tel Pety Rakotoniaina, ex-Pds de Fianarantsoa, tombe directement la veste contre le président Ravalomanana. Il faut attendre les réactions du principal intéressé pour apprécier s'il s'agit d'un coup fourré pour séparer le président national du parti Mfm de sa base, ou d'une insigne maladresse, difficilement compréhensible de la part d'un vieux loup de la politique. Pour le moment, les observateurs s'interrogent sur la stratégie de Manandafy Rakotonirina, mais estiment que le chef de l'Etat peut se frotter les mains. En publiant le décret de nomination, il vient de fragiliser Manandafy Rakotonirina, l'éloignant de ses militants et, dans la foulée, ébranle le Mfm, qui figure dans le groupe de tête des partis "dangereux" pour être un des plus structurés et des plus expérimentés dans l'activisme politique. La confirmation d'un statut de fait, celui de conseiller spécial, aura étonné tant dans sa nécessité que dans son opportunité. À une époque, interrogé par un journaliste de la station Tv Plus, le président national du Mfm avait déclaré en substance qu'il n'y avait point besoin de décret pour marquer les liens étroits qui existent ("déjà") entre sa personne et Marc Ravalomanana, des liens tissés depuis la place du Treize-mai. Il lui avait été demandé pourquoi son statut de conseiller spécial, conquis dans la rue, n'avait pas été formalisé une fois Marc Ravalomanana devenu président de la République. Il semble donc s'être accommodé de cette situation flottante, d'autant plus qu'elle lui permettait de jouer son propre jeu quand, dans une conjoncture devenue délicate, de fortes personnalités de son parti entreprennent de se désolidariser du régime et que de nombreux signes annoncent une rupture à l'horizon. Mercredi, alors que le torchon brûle entre son parti et le pouvoir, le moment a été choisi pour sortir un décret jugé de confirmation. Il intervient après une entrevue, rapportée par les journaux, de près d'une heure entre le président de la République et Manandafy Rakotonirina. Y a t-il eu accord ? La position du gourou du Mfm devient plus qu'ambiguë à moins qu'il ne s'agisse d'une initiative strictement personnelle du président de la République. Auquel cas, le leader Mfm aura été victime d'un coup de Jarnac. "Imprévu mais loyal" (de bonne guerre. Ndlr) selon le dictionnaire. :

Mamy Nohatrarivo