Madagascar: Ravalomanana se proclame président
vendredi 22 février 2002

L'opposant Marc Ravalomanana s'est proclamé président de la République vendredi à Madagascar, devant plusieurs centaines de milliers de partisans réunis au stade municipal d'Antananarivo et aux alentours.
M. Ravalomanana, maire de la capitale malgache et rival du président sortant Didier Ratsiraka dans l'élection présidentielle, a prêté serment après l'annonce, par un haut magistrat, de sa victoire au premier tour du 16 décembre "avec 52,15% des voix contre 35,67%" à M. Ratsiraka.
"Nous proclamons officiellement Marc Ravalomanana président de la République à partir d'aujourd'hui", a ajouté le magistrat, au micro, devant la foule et les personnalités religieuses de Madagascar, mais en l'absence des représentants du corps diplomatique, a-t-on remarqué. "Devant Dieu et devant le peuple, j'accepte la charge de président de la République, et je m'engage à donner toutes mes forces et ma sagesse pour l'unité nationale et les droits de l'Homme", a déclaré alors M. Ravalomanana, en malgache.
M. Ravalomanana a ceint ensuite une écharpe aux couleurs nationales de Madagascar, avant de s'adresser à la foule, en malgache lui aussi.
"Je veux respecter la vérité et les droits de l'Homme. N'ayez pas peur, je suis là pour faire progresser le pays", a-t-il déclaré, parsemant ses propos de nombreuses références à Dieu et à la Bible, comme à son habitude. "Nous devons respecter les étrangers qui travaillent à Madagascar, nous voulons travailler avec eux. Le pays était dans un gouffre, nous devons le remonter ensemble", a-t-il encore déclaré.
La foule a écouté calmement, ponctuant toutefois chacune de ses phrases de vivats et d'applaudissements.
La "cérémonie d'investiture" s'est achevée peu après 12h30 locales (9h30 GMT). Le stade a commencé à se vider tandis que M. Ravalomanana s'en allait en voiture, vers une destination non précisée.
Le rival à la présidentielle du chef de l'Etat sortant Didier Ratsiraka avait annoncé dès mercredi aux centaines de milliers de ses partisans qui manifestent chaque jour dans le centre d'Antananarivo qu'il allait prendre le pouvoir vendredi au cours d'une cérémonie d'investiture au stade municipal. Il avait tempéré ses propos jeudi, se montrant hésitant, tout en maintenant le rendez-vous à ses partisans.

M. Ravalomanana était soutenu quotidiennement depuis près d'un mois par des centaines de milliers de manifestants à Antananarivo et paralyse, grâce à une grève générale très suivie depuis plus de trois semaines, la capitale, poumon économique et coeur administratif du pays.
M. Ravalomanana a toujours prêché la non-violence (pas une vitrine n'a été brisée en près d'un mois de manifestations monstres) et le légalisme jusqu'à mercredi. Depuis trois semaines, les manifestants l'appelaient Président et rejetaient catégoriquement un second tour.
Le secrétaire général de l'ONU Kofi Annan, qui s'était déclaré "profondément préoccupé" par le projet de l'opposant malgache, avait tenté de le joindre par téléphone jeudi soir, mais sans succès, selon ces sources diplomatiques.
Les quatre candidats malheureux du premier tour de la présidentielle du 16 décembre qui avaient appelé M. Ravalomanana à reporter son projet, ont également tenté jeudi jusque tard dans la nuit de le convaincre de changer d'avis, selon un conseiller de l'opposant.