Gérard Rabevohitra :Renforcer la concurrence économique et financière !

 Ministre du Budget et du Plan à l'époque de Transition (1991-1992), Gérard Rabevohitra a été propulsé à la tête de la Commission des Finances à l'Assemblée Nationale durant la première législature de cette troisième République. Un peu en retrait de la scène politique, ce qui n'empêche ce disciple du MFM de nous partager un aperçu de la situation actuelle compte tenu de son parcours au sein de l'Ordre des Experts Comptables et Financiers de Madagascar.
    En se référant à la dernière restriction de comptes en devises qui vient d'être décrété par le gouvernement, ce Professeur titulaire à l'INSCAE s'interroge si la mesure ne va pas favoriser la floraison du marché parallèle des devises. A l'exemple de ce qu'il a constaté à Bucarest (Roumanie), l'homme prône la multiplicité des agences de change. "Il est vrai qu'il ne s'agit pas d'une transaction commerciale, mais cela contribue pourtant à l'amélioration de nos systèmes. Des agents de change existent bel et bien chez nous, mais comment peut-on les multiplier?", s'interroge-t-il ?
    
OLIGOPOLE
    En outre, ce dirigeant du CJR (Cabinet d'Expertise Comptables) a ses mots à dire à propos de nos systèmes bancaires. Globalement, ce sont les banquiers qui font fonctionner le MID (Marché Interbancaire de Devise), et la grande partie de nos banques se trouve dans le giron des filiales françaises. "Sur le plan stratégique, cela ne conforterait pas notre position dans la mesure où nous sommes en face d'une sorte d' oligopole sur le secteur financier", a-t-il indiqué.
En outre, les banquiers sont capables de déterminer le taux de parité et il ne faut pas s'étonner si le coût de l'intermédiation financier de notre banque figure parmi les plus élevés, autour de 8 à 11%. " C'est supérieur au coût de l'intermédiation financière de l'institution financière qui oeuvre dans un système concurrentiel efficace. A ma connaissance, là se trouve notre faiblesse!", continue-t-il.
FER DE LANCE
    Enchaînant sur ce constat général, il faut que la loi sur la concurrence soit sortie de la tanière. En effet, l'homme prône la concurrence de tous les domaines à commencer sur le plan industriel que financier et commercial. "C'est un processus à mettre en place et la balle se trouve entre les mains de l'Etat en tant qu'instigateur de la vie économique", poursuit-il. Au sujet du triple mesure anti-crise adoptée par le gouvernement, dont la réduction du budget de fonctionnement de l'Etat de 10%, l'homme n'est pas du même avis que l'initiateur de la mesure. Les 10% sont retirés à partir du crédit réparti alors qu'on s'achemine vers le budget-programme. En réalité, le coût amputé ou les dépenses doivent être prévus pour atteindre un certain objectif puisque les dépenses sont considérées judicieuses et devraient tendre vers l'objectif de croissance.
    Ce qui explique l'insuffisance de recette due à la mise en place de la détaxation. Si l'Etat vise à trouver une stabilité financière à partir de la réduction de 10% du budget de fonctionnement, "le risque plane sur le non aboutissement de l'objectif attendu et sur la maîtrise de l'inflation", a-t-il remarqué. Interrogé sur la question du développement en général, ce technocrate n'a pas omis de parler du processus pour assainir la situation politico-économique qui prévaut actuellement. Sans insister sur le credo de la réconciliation nationale, Gérad Rabevohitra trouve que l'institution de la loi d'amnistie constitue un fer de lance si on veut vraiment agir pour le développement rapide. "Je suis pour l'amnistie sélective. D'ailleurs, c'est le respect de l'être humain et la restauration de la dignité perdue. Quand on pardonne, on ne penserait plus à un récidive",  conclut-il.

 Recueillis par Adrien R.

 Madagascar Tribune 19/07/04