Réconciliation nationale et loi d’amnistie
LE DEBAT N’EST PAS ENCORE CLOS

Si on interprète bien les faits qui ont eu lieu ces derniers temps dans le microcosme politique malgache, le MFM est en train de véhiculer l'idée de l'adoption de la loi d'amnistie par les parlementaires malgaches, et Olivier Rakotovazaha, dont nous avons déjà évoqué les remarques sur les propos du Chief of staff de la Présidence hier, ne déroge pas à la règle.

 « Il est évident que les différentes instances internationales, aussi bien le ministre des Affaires étrangères français que le ministre des Affaires étrangères sénégalais, ont parlé de réconciliation nationale dans leurs déclarations sur Madagascar, le premier lors de son passage devant le Sénat français, le second dans sa note verbale à l'intention de son vis-à-vis malgache" explique Olivier Rakotovazaha.

Souhaitable

Ce dernier, comme  il l’a déjà déclaré, est persuadé que proclamer l'amnistie est souhaitable par rapport au concept de réconciliation nationale, qui nécessite une discussion autour d’une table ronde entre les différents antagonistes, et affirme ne pas comprendre pourquoi on s'écrie devant la perspective d'adopter une telle loi. Et c'est justement là que le Chief of Staff de la Présidence, Ranaivoson Henri Roger n'était pas d'accord, car il estimait qu'en l'absence d'affrontements comme au Rwanda et en Somalie, détruits par un génocide, Madagascar n'a pas réellement d'antagonistes, qui doivent se réunir autour d'une table pour procéder à une réconciliation nationale. Ceux qui sont dans le même raisonnement que lui sont également persuadés qu’il y a eu des divergences de points de vue, des actes de violence qui ont entravé la libre circulation, et qui ont porté atteinte à la sécurité du pays, mais pas d’affrontements entre originaires de différentes régions, qui ont conduit à des génocides ou à la mort de plusieurs personnes en même temps. La réalité est que d'anciens dirigeants sont réfugiés à l'extérieur, et ont été condamnés à des peines diverses par le tribunal de première instance pour des actions commises durant la crise.

Possible retour

Si réconciliation nationale il y a, ce seront donc eux qui se mettront autour d’une table ronde pour discuter avec leurs vis-à-vis, c'est-à-dire les dirigeants actuels. Et vu les peines qui les attendent, ils ne pourront librement se livrer à cet exercice que s'ils sont amnistiés. Ce qui ramène incontournablement à la proclamation de la loi d'amnistie. Mais là où le bât blesse, pour l'ensemble de la population, c’est que le retour de ces dirigeants au pays signifie leur possible retour au pouvoir, et donc possibilité d’une nouvelle instabilité politique. Après la crise que le pays a traversée, cette perspective n'est sûrement pas celle que le commun des Malgaches souhaiterait. Bref, pour ceux qui prônent aussi bien la réconciliation nationale que la loi d'amnistie, la manœuvre ne sera pas facile, à moins qu'ils ne soient réellement prêts à affronter la réaction de la population. Même si les Malgaches ont une grande notion de "fihavanana", il y a des événements, surtout si récents, qu'ils ne sont sûrement pas encore prêts à effacer.

Bodo A.

Midi Madagasikara Vendredi 27 février 2004