Régions:  Plus que jamais d'actualité

 La mise en place des Régions a été décidée depuis longtemps et le nouveau régime est aujourd'hui en train de la mettre en oeuvre. La Région est l'échelon de décentralisation intermédiaire entre les Communes et l'Etat central. 72 sénateurs ont discuté mercredi dernier des tenants et aboutissants du projet de loi 005/04 déjà adopté par l'Assemblée nationale. Des échanges d'informations et des débats plus approfondis ont nécessité une poursuite de la réunion ce jour. Il faut dire que l'enjeu est de taille car malgré les réticences et les critiques, la Région ne peut qu'être l'opportunité pour tous, en particulier les citoyens des fokontany, des communes et des régions, de prendre part aux décisions de développer les parties du territoire national enclavées et délaissées jusqu'ici.

La région est l'expression même de la démocratie participative et de l'internalisation du processus de développement. A beaucoup d'égards, les discussions ne devraient plus, au niveau du Sénat, porter que sur les aspects techniques et non plus historiques, culturels ou ethniques des découpages et des choix des chefs lieux de régions, mais sur les atouts et les opportunités économiques car ces régions seront des régions économiques dont les leviers principaux sont les chefs lieux qui seront dès lors appelés à devenir dans les plus brefs délais à devenir des pôles de croissance. Grâce à ce projet de loi, il est désormais possible à toutes les parties de l'île d'émerger. Le problème sur lequel on devrait focaliser les discussions, disait un sénateur, est le transfert des pouvoirs, des compétences et des ressources. Le Programme d'investissement public (PIP) offre des opportunités pour ce faire grâce à cette enveloppe de près de 3.110 milliards Fmg. Une distribution équitable dans une proportion respectivement de 20 %, 5 %, 5 %, aux 22 régions, 1.623 communes et 15.152 fokontany, selon le sénateur Jean Louis Rakotoamboa, contribuera efficacement au développement à partir de la base (fokontany, commune) facilitant l'organisation d'une économie d'échelle à partir des régions pour qu'elles puissent faire face ou accéder à la mondialisation ou du moins aux échanges régionaux.

Il est temps...

    Au moment où les accords de financements affluent ; au moment où la confiance des "nouveaux" partenaires se consolide, le pays, si on ne devait considérer que les comportements de certains sénateurs à l'égard de la loi sur les Régions, semble tergiverser. Après la confiance des Etats-Unis d'Amérique exprimée de vive voix par son ambassadeur Wanda Nesbitt, lorsqu'elle a annoncé l'élection de Madagascar parmi les pays éligibles au titre du "Millénium Challenge Account" (MCA), voici que les Nations Unies, après avoir choisi Madagascar comme pays-pilote en matière de développement agricole, viennent également d'élire Madagascar, pilote en matière de développement industriel. C'est ce qu'a indiqué le Premier ministre, qui n'a plus pu cacher ses talents d'avocat, mercredi dernier en début de soirée à Tsimbazaza. Sans oublier, il est vrai, le don effectué par la Banque mondiale en faveur de l'environnement en général et qui s'élève à des dizaines de millions de dollars. En tout cas, "Madagascar est pressenti pour devenir le grenier à riz du COMESA", a expliqué le ministre Ranjeva à l'Assemblée nationale.
    Le 14 mai dernier, à l'occasion de la célébration de la "Journée de l'Europe", Pierre Protar, ambassadeur, Chef de la Délégation de la Commission européenne a conclu son discours en disant qu'en résumé, pour la Commission européenne, "Madagascar fait partie de la liste des pays ACP performants. Ce point de vue est partagé et défendu par les Etats membres de l’Union européenne. Il est également partagé par d’autres partenaires comme les Etats-Unis et les Institutions de Bretton Woods". Deux nouvelles conventions de financements seront aujourd'hui signées entre l'Etat malgache et l'Union européenne ; l'une portant sur la facilité de coopération technique (5 millions d'euros) et l'autre sur des études détaillées relatives aux routes nationales secondaires dans le sud (3 millions d'euros).

    "L'axe directeur est la création de nouveaux pôles économiques", dixit Manandafy

 Au delà de toutes les considérations d'ordre purement politique, avions-nous écrit précédemment, beaucoup de techniciens du développement, beaucoup de cadres et ressources intellectuelles du pays sont d'avis à admettre que les régions sont une opportunité qui autorise un décollage économique du pays entier. Ceci dit, une opinion trouve qu'il y a deux catégories de personnes qui sont contre la mise en œuvre des Régions : d'une part, celle qui ne souhaite pas partager les ressources et les richesses et qui veulent perpétuer leur main mise sur les richesses et ressources des autres parties du territoire, et d'autre part celle qui ont la courte vue et qui, pour des raisons fallacieuses conduisent encore un combat d'arrière-garde datant du XIXè siècle. Or nous sommes aujourd'hui au XXIè siècle, à l'heure de la mondialisation, nous a confié Manandafy Rakotonirina. Dorénavant, a-t-il poursuivi, "la perception des découpages territoriaux doit considérer l'émergence rapide de pôles économiques. Plus besoin de s'attarder aux divisions territoriales obsolètes, fondées soit sur l'ethnie, soit sur l'histoire, a-t-il fait comprendre car le cours de l'histoire ne s'arrête pas pour nous attendre. Le projet de soutien au développement rural (PSDR) qui dispose de l'enveloppe indispensable au développement des régions offre jusqu'en 2007, quelque 66 millions USD aux groupes de travail GTDR pour permettre un meilleur décollage aux opérateurs et aux paysans des régions.

De même, dans le cadre du 9è FED, une enveloppe financière de 267 millions d’euros (environ 3.000 milliards de Fmg) a été mise en place il y a moins de deux ans. Or, ce montant sera totalement engagé avant le 30 juin de cette année. Tout récemment, le Comité du FED, présidé par la Commission et composé des représentants des Etats membres, a donné un avis favorable et à l’unanimité sur deux programmes importants :

    - le programme d’appui aux communes et organisations rurales pour le développement du Sud, pour un montant global de 60 millions d’euros et avec la mise en place d’une première tranche de 32 millions d’euros,

    - le programme de réhabilitation du réseau routier national dans le Sud, d’un montant de 43 millions d’euros.

    Deux interventions complémentaires visant, d’une part, à la création de pôles de développement local et régional et, d’autre part, à poursuivre les avancées en matière de désenclavement du pays. Elles sont la concrétisation de la stratégie intersectorielle du Gouvernement pour qui le développement local, c’est-à-dire là où le taux de pauvreté est le plus répandu, passe par la responsabilisation des communes oeuvrant à l’intérieur des régions et, également, par l’ouverture des zones semi-urbaines et rurales à la circulation des biens et des personnes. "Chaque kilomètre réalisé de route pérenne constitue une victoire sur le recul de la pauvreté", admet le Chef de Délégation de la Commission européenne, Pierre Protar. Bref, il est plus que jamais temps d'adopter cette loi sur les Régions.

Madagascar tribune  21/05/04 - Recueillis par RAW